Robert Adams, l'infinie clarté

Robert Adams au jeu de paume, Denver, Colorado

 

Entre photos « self explanatory » et photos « avec un placard pour dire ce que l’artiste  a voulu dire ». Entre formats gigantesques pour commandes publiques, pour fraquiser la production et piocher dans la manne de l’argent public, et photos pour elles-mêmes sans épate ni esbrouffe, qui montrent à quel point l’œil sait écouter. Entre pureté et compromission, voilà les extrêmes que les « curateurs » du Jeu de Paume ont réussi à associer sous un même toit ! Entre Robert Adams et Mathieu Pernot, osons le gros mot : « il n’y a pas photo ».

C’est du talent discret, silencieux, opiniâtre de Robert Adams que je veux parler ici bien loin des rodomontades et des politi-publicités de l’autre hôte des cimaises du Jeu de Paume.

 

La photo selon Robert Adams ou le silence lumineux des lieux habituels.

 

Quand on habite quelque part, n’importe où, dans le château de Versailles ou dans un immeuble tout de guingois de la banlieue parisienne, deux visions sont possibles qui, se déclinent ensuite en sous-genres : on y heureux ou, au contraire, on exsude la haine. Robert Adams a été heureux à Denver Colorado. On dira que le photographe est surement un ascète ! Qu’aimer un pays aussi plat, aussi immensément plat, sans mer qui danse et scintille est sûrement la preuve d’un esprit austère aux confins du protestantisme le plus sévère ! Ou bien on dira que Robert Adams aime regarder, sait voir, a aussi la patience de revenir sur les lieux de la photo, de chercher et de retrouver les dessins qui se forment sur les immenses surfaces désertiques.

La photo que « fabrique » Robert Adams est un exercice d’ascèse : rien d’inutile, et d’optimisme, tout a vocation à la lumière. Les principaux acteurs qui donnent à son travail une dimension « humaine, très humaine », sont d’abord la lumière et sa capacité miraculeuse à modeler et sculpter, ensuite les horizons infinis servis par des lignes de fuite gigantesques, enfin les gens, qui semblent être là pour animer et inscrire lumière et infini dans le temps.

Ce qui est là, photographié par Robert Adams est posé, déposé, reposé, apposé, rien à dire, rien à faire, c’est là. Et c’est bien.

Les photos où autoroutes, sentiers, fractures du sol, énoncent que l’infini n’est pas loin sans pour autant susciter de crainte ; ils font des lignes de fuite un acteur essentiel de la vie et de la prise de vue. Le Colorado, ce sont des espaces considérables où l’œil n’est interrompu par rien. Les lignes d’horizon présentes dans un grand nombre de photos, viennent dire que si l’espace paraît infini, il est une limite qui sépare terre et ciel, même si elle peut paraître fragile, même si terre et ciel paraissent avoir tant d’affinités qu’ils se mêleraient et entraîneraient des doutes et des confusions. Dans ces univers où le regard n’est pas interrompu, la lumière parvient, à coup de pierres éparses, de sentiers à peine tracés ou d’arbres dans le lointain, à dessiner un monde de pure blancheur ou de pure noirceur. Là où est la lumière, est l’ombre et toutes deux jouent l’une avec l’autre à faire naître repères, structures et formes.

C’est limpide dans une photo classique, « larimer county » 1977 où l’autoroute crée l’effet de fuite. C’est lumineux dans Alkali Lake, couvert de lentilles de lumière qui s’oppose à la lumière uniforme du ciel. Le lointain, l’éloignement, l’infini des distances sont rendus au moyen d’un incendie dont la fumée noire vient s’opposer à la blancheur du paysage. Fumée qui aussi illustre par son élévation et son expansion la combinaison noir-lumière autour de laquelle de nombreuses photos de Robert Adams sont construites.

Les photos de paysage parlent de l’immensité, de l’infini, des lignes primitives qui permettent de les contenir : lignes de fuite, lignes d’horizon ; les photos de bâtiment, de maisons, de camps et de lodges parlent de l’esprit de construction et de la pureté des formes issues de l’esprit humain. Leur force  réside dans leur simplicité. Logements 1980 est une remarquable photo où une construction banale est enchantée par une mise en page impeccable. L’église méthodiste – Bowen 1965- est par elle-même une pure démonstration de photo d’architecture, un cas d’école où le minimalisme d’une construction est porté au plus haut par la photo et sa capacité à user de l’ombre et de la lumière pour transfigurer un bâtiment.

Les nombreux clichés de mobile home, les villes entières qui en sont constituées, les alignements impeccables sont autant d’occasion de mettre en valeur ces formes simples, cubes, parallélépipèdes, angles droits, pentes de toits et fronton en triangle. Aucune lassitude de la répétition des formes semblables n’en ressort. Ce sont à la fois des faits simples, présence humaine, vie américaine et des formes pures où le cubisme s’impose.

Les gens et les villes sont approchés par Robert Adams avec la même sensibilité. Pas de pathos, pas de larmes, pas de petites filles charmantes sous leur crasse, ni de « lady » ridicule sous la couche de fards. Des gens qui se promènent et parfois font penser à ces personnages de Chirico tant ils se dessinent le soir tombant accompagnés de leurs ombres gigantesques sur fond de colonnades. Des moments de la vie de tous les jours. Moments simples. Sans ombres parfois, car il est midi. Le cadre de leur vie est retracé, comme savent le faire les artistes américains. Les stations-services colorent et animent ces villes sans reliefs.

C’est une photographie sans emphase, sans effets de manche ni boursouflures d’ego. Robert Adams donne à voir et n’impose rien. En veut-on une « preuve » ? On la trouvera dans la taille des photos, selon les standards actuels elles sont petites. Elle convient à une lecture et non pas au spectacle. Elles parlent à voix basse ou chantonnent une musique, celle des lieux où on a été heureux, celle où des gens ont envie de l’être.

 

 

 

 

 

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