Soliloques sur l'art, août 2023

Numéro exceptionnel sur le cinéma

A voir Absolument
 
La liberté d’être, en trois films

 

Par un hasard incroyable, j’ai eu le plaisir de voir en quelques jours, trois œuvres cinématographiques exceptionnelles d’intelligence et de portée intellectuelle. Belle revanche ! car peu de temps avant j’avais traversé avec quelques encombres d’humeur, deux spectacles sans intérêt ou dramatiquement nuls. Mon opinion sur l’industrie cinématographique s’est donc, par bonheur, vigoureusement remontée après avoir vu ces trois œuvres : la Colonia Dignidad, Oppenheimer et Barbie.
On me dira que c’est une faute de goût que d’apparier Barbie et Oppenheimer, et même, pire encore, Barbie et la Colonia et pourtant….
Dans les trois cas, c’est bien de la liberté d’être qu’il est question. Liberté d’échapper aux pensées convenus, aux formatages des opinions, à la bien- pensance et aux manœuvres plus ou moins violentes, plus ou moins totalitaires pour annihiler ou réduire la portée de cette liberté.

« Oppenheimer »


 Film exceptionnel en ce qu’il apporte à la question du choix libre et de la liberté de penser telle que la vivra Oppenheimer le patron de la Base Alamo où fut conçue et expérimentée la première bombe atomique. Le film n’est pas l’histoire pure et simple de ce projet extraordinaire qui a consisté en la mise en œuvre de ce qui n’était au tout début qu’une idée, un concept, sans consistance pratique et encore moins sans certitude militaire.

Le film met en lumière, un homme, remarquablement intelligent, désigné pour conduire un projet incroyablement complexe et novateur en rassemblant toutes les compétences possibles dans tous les domaines de la recherche nucléaire. Le scénario est passionnant en ce sens que plutôt que de laisser aller une histoire et d’en suivre le déroulement temporel, l’accent est mis, en permanence, sur la mise en cause de la loyauté d’Oppenheimer dans le cadre de la lutte déclenchée après la guerre par le Maccarthysme contre les idées et mouvements communistes aux Etats-Unis. Ces deux perspectives sont aussi entre-coupées par l’histoire même d’Oppenheimer, de ses idées, de ses passions et de ses hésitations : il développe le questionnement qu’il ne cesse de s’adresser à lui-même sur le projet qu’il anime, sur les conséquences qu’il entrevoit, sur les ambiguïtés de la réussite exceptionnelle vers laquelle il a su porter le projet et sur la radicalité d’une mise en cause personnelle.

 

Ainsi s’entrelacent le déroulement d’un projet sans égal dirigé par un homme d’exception et mettant en œuvre des savants hors normes, le récit de sa mise en accusation dans des conditions révoltantes et l’éclairage humain, très humain sur les conflits intimes que déclenchent en lui, la volonté de faire aboutir la mission qui lui a été confiée et de contrôler moralement politiquement les conséquences qui découlent de l’invention de la Bombe A.

 
 

« Colonia Dignitad »

 

Ce documentaire peut être vu sur Netflix. Il traite de la vie des membres d’une communauté de type évangélique sous le « gouvernement » d’un gourou, ancien Pasteur Luthérien, pédophile et phénoménal communicant qui, fuyant les poursuites pénales de l’Allemagne de l’après seconde guerre mondiale, va s’installer au Chili avec des « colons » sous son influence.

Le documentaire s’appuie sur des témoignages d’anciens membres de la « Colonia » et sur de très nombreux extraits de vidéos prises dans le cadre de la colonie. Le thème de l’emprise, sur fonds d’abandon de soi, en tant qu’individu est traité avec rigueur ; la vie communautaire absolue où les enfants sont séparés de leurs parents pour être élevés à part, où les hommes et les femmes vivent séparément et ne se retrouvent que dans des festivités « folklorico-allemandes » est l’objet de développements et de commentaires saisissants.

La complicité de l’environnement institutionnel, pouvoirs chiliens et allemands, fait l’objet d’une description dramatique. Un jour, pourtant, la liberté s’imposera. Difficilement, lentement, malgré la passivité et l’hostilité des victimes elles-mêmes. Et après, il faudra vivre quand même. La liberté a aussi un prix auquel on ne s’attend pas forcément.

 

Barbie


L’enjeu est bien loin des centaines de milliers de morts suivant l’explosion des bombes d’Hiroshima et de Nagasaki… et de l’impression des esprits par le moyen de la violence et de la peur. Mais l’enjeu de « Barbie » n’est-il pas au moins aussi important, celui de la formation des esprits par le moyen du jeu.

Dans la psychanalyse des contes de fées, Bruno Bettelheim énonçait : « …Et les contes de fées ont pour caractéristiques de poser des problèmes existentiels en termes brefs et précis. L'enfant peut ainsi affronter ses problèmes dans leur formes essentielles, alors qu'une intrigue plus élaborée lui compliquerait les choses… Le conte de fées simplifie toutes les situations. Ses personnages sont nettement dessinés. Tous les personnages correspondent à un type, ils n'ont rien d'unique. »

Avant tout, avant de tirer les leçons de ce film, il faut dire à quel point le scénario, la mise en scène et les acteurs « collent » admirablement avec le propos et surtout avec « Barbie, le jeu, avec Ken, le compagnon de jeu de Barbie » et avec leurs interprètes tout simplement extraordinaires d’intelligence et de finesse.

Donc, le film traite de Barbie et de ses (més)aventures dans le monde réel. En vérité, tout est réel dans ce film, à commencer par la vie de poupée pour terminer par les poupées dans la vie. Barbie n’est pas réelle ? Allez donc dire ça aux petites filles ! Barbie n’a pas de personnalité ? Allez donc expliquer qu’une femme médecin, présidente, ingénieure, infirmière, agent de surface n’est qu’un machin uniformément reproduit sans égard pour le regard des petites filles. Barbie, habituant celles-ci à se projeter dans des métiers, des comportements, une vie moderne ne les a-t-elles par libérées de la représentation traditionnelle de la femme et de sa soumission à cette représentation formatée depuis la plus tendre enfance.

Les premières images du film sont tout simplement fabuleuses et, empruntant (largement) à celles du film de Kubrick « 2001, l’Odyssée de l’Espace », montrent la révolution « Barbie » et sa contribution à la réforme mentale des petites filles. Le personnage de « Ken », quant à lui, introduirait l’idée que les hommes sont fondamentalement prétentieux, fats et … puérils.

Ce serait donc là le principal message du film ? Pas du tout, Barbie, propulsée dans le monde « réel » se trouve confrontée à des petites filles qui lui reprochent d’avoir tenté de leur imposer une vie de cliché, d’attentes impossibles à satisfaire et de soumission à des modèles artificiels. Barbie, n’est donc pas la petite fille parfaite, comme avant elle le « poupon » n’était pas la poupée idéale. Tout s’écroulerait donc et Barbie, ne serait pas un mythe fondateur mais une illusion collective manœuvrée par le grand capital et les forces d’oppression qui lui sont associées. La liberté des petites filles aura été brimée et bridée. Leur esprit formaté pire que ce que pouvaient faire des gourous, pire que ce qu’ont fait les idéologies.

Comme les deux films précédents « Barbie » n’est pas une histoire qui finit tristement. Barbie, la poupée, finalement perdra en mythe, ce qu’elle gagnera en idéal, devenant ainsi, un pont entre fragilité enfantine et liberté d’être de l’adulte.

 

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