Les tribulations de Mélinez et de Martenchon, janvier 2025

 

Le suicide n’est pas toujours un drame solitaire .


 

Mélinez sursauta : il s’était plongé dans la lecture d’un quotidien du soir, très célèbre pour la profondeur de ses pensées et la hauteur de ses vues. Et justement, ce soir-là, cela ne rata pas, il y avait tous les ingrédients pour la profondeur et la hauteur : un cheminot venait de mettre fin à ses jours. L’article qui commentait ce drame, mettait en valeur combien le destin est dur et lourde la main des Dieux.

Mélinez laissa échapper : « Quelle tristesse ! Quelle horreur ! Mourir ainsi, se jeter froidement sur les cailloux du tarmac… si durs, si acérés ! »

Martenchon, écoutait sans écouter « Encore un malheureux migrant sans papiers qui a voulu échapper à la police des frontières ? »

Mélinez, hautain, haussa les épaules : « C’est d’un cheminot qu’il s’agit. Un cheminot qui s’est jeté de sa locomotive en mouvement pour en finir avec la vie de souffrance et d’échec qu’il menait. »

Martenchon, qui n’a jamais aimé les comportements grandiloquents ne put s’empêcher de faire remarquer que « le grutier saute du haut de sa grue, le marin se jette par-dessus bord, le banquier avale des lettres de change jusqu’à ce que mort s’ensuive. En général, les gens qui se suicident au travail, utilisent les ressources qui leurs sont offertes par le travail même. Pour un cheminot, ce sera le train ! »

Mélinez se dressa d’un bond et, pointant le doigt (le majeur) vers Martenchon, s’écria « De mortiis, nil nisi bonum* ». Cet homme qui est mort succombant sous le poids des problèmes, c’est notre frère ! à nous qui avons aussi notre part de souffrances… La preuve : les pouvoirs publics et la CGT dont il était un des responsables les plus respectés ont commenté tristement la mort dans d’aussi tristes conditions d’un homme à la trop triste condition ! ».

Martenchon sauta en l’air, lui aussi : « Tu veux dire qu’on a panthéonisé, un type qui s’est éclaté au sens presque propre du mot et a failli provoquer la mort d’une centaine de ses compatriotes. J’espère que j’ai mal entendu et que tu as confondu la mort de ce pauvre type avec le drame de Mayotte. »

Mélinez, surpris, ne trouva à répondre « Mais, nous nous devons d’assister et de compassionner tout homme dans la peine et les conséquences néfastes qu’il en tire… »

Martenchon, hurla « Tu es complétement fou ! Ce type, tout attristé qu’il était, aurait pu, pour passer de vie à trépas, choisir autre chose que les roues de la locomotive qu’il conduisait. Réfléchis quelques secondes : il conduisait une locomotive qui tirait un train de voyageurs, avec plein de voyageurs dedans, dont nécessairement des femmes et des enfants. Eh bien, monsieur le conducteur qui avait une grosse tristesse, il a fait comme le gardien de phare de Prévert si triste qu’« il éteint tout »** et provoque des naufrages par centaines. Monsieur le conducteur, il s’en tape des passagers. Monsieur le conducteur, s’il avait été chauffeur d’un bus pour enfants partant en vacances, se serait lui aussi, jeté sur la chaussée de l’autoroute, avec les conséquences évidentes qu’on devine ! et je ne parle pas du pilote d’avion dont l’esprit se met à battre la campagne… ».

« Et la CGT s’est fendue d’un pleur mémoriel tout en dénonçant une "communication hâtive"! » C’est bien normal, l’esprit de corps est insensible aux conséquences. « Car dans la vie de tous les jours, cet ancien secrétaire syndical CGT des cheminots de la Loire mettait toute son énergie au service des autres ».
Sauf aux passagers qu’il a failli massacrer.

*Au sujet des morts on ne doit dire que de bonnes choses
**Prévert : poème « le Gardien de phare »

 

Et si le diable était derrière tout ça

 

 

Mélinez qui revenait du marché avait, en passant devant son kiosquier habituel, fait le plein de nourritures intellectuelles. Martenchon tomba comme par hasard sur une information qui le fit sauter en l’air. Non que le cher homme ait continué à nourrir tendresse et conviction à l’égard de la religion dans laquelle feue sa mère l’avait élevé mais, tout de même il lui restait quelques attachements dont Chateaubriand aurait pu se saisir pour illustrer son grand œuvre « le génie du christianisme ».

« Les écrits journalistiques sont de plus en plus fangeux, éructa-t-il »

Mélinez qui n’avait pas encore dépouillé la presse se fit interrogatif.
« Vigny en son temps ne disait-il pas la même chose ? ».

Martenchon réagit violemment « Vigny n’aurait pas pu penser à pareilles vilénies ! Ecoute bien Mélinez, écoute bien : « Le Vatican encadre les usages de l’intelligence artificielle en son sein ». Deux monstruosités en une phrase, pour dénigrer une fois de plus la religion la plus pratiquée dans le monde.

Mélinez se voulut conciliant « Je reconnais qu’à Rome évoquer « le sein de l’église » peut inférer une sorte de confusion avec la fameuse louve « …celle de marbre//Qu'adorait les romains… »…

Martenchon, rejeta l’argument avec mépris « Le sein du Vatican, même Michel Ange n’y aurait pas pensé… je parle de l’intelligence artificielle ! Je parle de cette prétention du Vatican, puissance temporelle à encadrer une puissance qui n’est pas même spirituelle »

Mélinez, se fit soudain sérieux et inquiet « Et si l’intelligence artificielle n’était pas autre chose qu’une manœuvre de Satan ? Et si Satan subvertissait les âmes simples en soutenant qu’il n’est de hautes pensées que venant des tréfonds informatiques ? et si Satan, mêlant les 0 et les 1, alors que le Seigneur les avait séparés comme on sépare le bon grain de l’ivraie, la droite de la gauche, le passé de l’avenir etc. s’apprêtait à brouiller l’esprit des croyants en leur donnant à croire en une mystique quantique ? Et si Satan pour troubler le monde et ses citoyens était en passe de leur faire croire à un supplément d’âme en faisant émerger un président MAGA ».

Martenchon, au fur et à mesure de l’accumulation des « et si », s’était comme effondré sur lui-même et se prit à désespérer : Le Vatican saura-t-il lancer l’intelligence spirituelle pour chasser le spectre quantique où se dissimule le Malin ?

 

Les nuages couraient sur la lune enflammée// Comme sur l'incendie on voit fuir la fumée,
 

Les deux amis avaient hésité. Mais, l’attrait de l’étrange et du surprenant avait été le plus fort. On avait annoncé l’évènement sur écran géant. Ils n’étaient pas les seuls à se presser pour ne pas rater le spectacle. Cela devait donc être grandiose, du jamais vu depuis ces temps où la Rome antique avait flambé. Le grand incendie de Londres serait ravalé au rang d’un incendie de quartier à Marseille. La fameuse montgolfière des jeux olympiques de Paris qui avait tant impressionné les foules était bien en dessous.

Un regret cependant :

Mélinez fendant la foule et jouant des coudes trouva le moyen de faire remarquer à Martenchon que, à tout prendre, même si l’écran serait géant, cela ne vaudrait pas la vision réelle.

Martenchon, un peu essouflé de marcher sur tant de pieds pour pouvoir se rapprocher des meilleurs places, trouva le moyen de répondre avec une certaine hauteur de vue : « un métavers aurait été beaucoup trop compliqué à monter. Entre l’image en trois D et l’image en réalité virtuelle, il n’est pas certain en effet que cette dernière ait tant d’avantages.

Ils furent un peu désappointés en arrivant aux places qu’ils avaient acquises pour un prix d’or. Ils avaient pris plus de temps que prévu. Le spectacle avait commencé.
Martenchon observa « Il est vrai que ça rougeoyait ferme dans le lointain quand nous sommes partis ».

Mélinez le consola en lui faisant remarquer qu’au moins, malgré tout, il avait pu voir de nombreuses célébrités des arts, des spectacles et des lettres, courir pour échapper à une mort probable.

Martenchon, sarcastique, : « Cela avait en effet un léger parfum de Pompéi ».

Mélinez l’interrompit en criant : « ça y est on voit bien ce qui se passe ! C’est incroyable, c’est fou »

Martenchon, avait posé sur son nez des lunettes protectrices, l’incendie valait par sa luminosité et les risques pour les yeux, toutes les éclipses de soleil.

Mélinez, était enchanté du spectacle : « Quand même je n’aurais pas imaginé même dans mes rêves les plus fous que je verrais Los Angeles flamber ». Quelques larmes d’admiration perlaient sous ses yeux. Il ne pouvait s’empêcher de pousser des oh ! et des ah ! quand, un toit s’effondrant, il en venait un jaillissement de flammèches, de braises et d’étincelles, quand ces mêmes braises en s’envolant illuminaient le ciel
et annonçaient de futurs foyers d’incendie.

Martenchon se pencha vers Mélinez, l’air inquiet « Tu crois qu’il va venir, vraiment ? ».

Mélinez répondit à voix basse qu’il en était absolument sûr et, tout d’un coup, s’arrêta de commenter, un cri fou, inhumain par sa puissance se déployait comme un tsunami dans l’arène.

Mélinez sourit à Martenchon : « Tu vois, il est venu ».

Donald tourné vers la foule fit un geste d’apaisement. D’un coup le silence se fit. On entendit les haut-parleurs porter sa voix : « My friends: Fire, and do not forget ! Il dit quelques mots pour remercier tous ceux qui participent à l’évènement. Puis, levant les bras, et applaudissant en même temps, il cria « et maintenant, je vous laisse admirer Los Angeles brûlant et surtout je vous laisse avec une grande artiste… qui a su mettre en musique ce magnifique spectacle et c’est

 

Taylor swift

A l’instant où il avait prononcé ce nom, la foule, hurlante, quitta le spectacle de la ville en flamme pour se porter vers celui de la fille en feu.

Mélinez et Martenchon, quand ils revinrent chez eux n’eurent pas un mot de commentaire. Seules les étoiles au-dessus d’eux savaient ce qu’ils pensaient. Et c’était « great again ».

 

Où trouver l'argent?

 

Il est certain, et ils se le sont dit et répété à de nombreuses reprises, il fallait refaire le salon dans lequel les deux amis, Mélinez et Martenchon, discutent de l’avenir de l’humanité. La fumée des bûches dans l’âtre en hiver, celui des pipes et cigares, l’atmosphère polluée des grandes villes, tout militait pour qu’un bon coup de pinceaux soit appliqué.

Oui mais voilà, ce genre d’initiatives coûte de l’argent sans en rapporter vraiment. Or, Mélinez et Martenchon ne roulaient pas sur l’or.


Mélinez, toujours à l’affut des nouveautés dans le domaine financier, lança une idée qui semblait marcher « à fond la caisse » : « Je pense qu’il nous faudrait lancer une nouvelle monnaie cryptée. Nous lui donnerions un nom qui parlerait de nous, qui ouvrirait la porte sur l’avenir et convaincrait nos admirateurs d’ouvrir largement leurs poches ».

Martenchon qui n’avait jamais cru aux techniques subtiles des crypto-monnaies lança une remarque fortement dubitative. « Je ne crois pas à ces tours de magie monétaires » ;

Melinez, retorqua triomphalement « Eh bien ! mon ami, cela marche pour le Président Trump !  Et cela n’a rien de magique, il vient de lancer un « trump coin » dont la valeur initiale était de 7 dollars et qui, en quelques instants, est passé à 75 dollars. Comme, 200 millions ont été émis, je te laisse imaginer le coup de booster pour la fortune du Président »

Martenchon, de mauvaise humeur jeta un « En quoi, ça nous concerne ! Nous n’avons pas assez d’argent pour nos travaux : nous n’allons surement pas investir dans les Trump coins ! »

Mélinez, apitoyé, : « Tu ne comprends pas que nous pourrions suivre cet auguste exemple »

Martenchon, énervé : « Je ne te suis pas du tout »

Mélinez, paternel, « C’est simple, nous allons lancer un coin, comme le président vient de le faire. On le nommera Marmel d’après nos deux noms contractés. On commencera à 1 dollar pour dix mille coins, ce qui nous fera 10 000 dollars au moins, mais peut-être si la demande est forte, le prix montera jusqu’à 5 dollars, ce qui nous fera largement de quoi refaire notre salon et même la cuisine ».

Martenchon, intrigué « Mais si, plus tard, ceux qui ont acheté à 5 dollars ne peuvent pas à revendre à ce prix, que ferons-nous ? »

Mélinez devint hautain : « Nous leur dirons qu’ils sont venus de leur plein gré et qu’il leur appartient de prendre leurs responsabilités. S’ils ne sont pas contents, on leur enverra Elon Musk ».
 


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