Les monnaies cryptées, causes ou sous-produits de la "révolution économique informatique" ?

 

Paiements en ligne, fintech, monnaies cryptées sous la forme de tokens ou de coins, l’informatique des paiements entretient la confusion sur la nature et le rôle de la monnaie. (Par Pascal Ordonneau, secrétaire général de l'Institut de l'Iconomie)

 

 

Les Echos. Le cercle.

Publié le 18 janv. 2021 à 9:04Mis à jour le 18 janv. 2021 à 9:07

 

 

Dans une récente interview, Jay Clayton, patron de la SEC jusqu’en fin 2020, déclarait : "Nous avons déterminé que le bitcoin n’était pas une "sécurité", et que c’était bien davantage un mécanisme de paiement et de conservation de la valeur".

Le bitcoin n’est pas une "Security"

Aussitôt, la crypto-sphère s’est enflammée : on pouvait donc déduire que les soi-disant crypto-monnaies étaient vraiment des "monnaies" (elles cochaient au moins deux cases de la définition aristotélicienne). Donc, la nouvelle "libra" de Facebook, nommée aujourd’hui le "diem" pouvait se présenter comme une monnaie à part entière ; mieux encore que le bitcoin puisqu’il s’agit d’une monnaie appuyée sur d’autres monnaies (un stable coin) et sur le dollar dans un premier temps. Le propos, en contradiction avec les déclarations de la FED, tombe vraiment trop bien.

Allons au plus proche de l’information : Facebook, comme Tweeter, Google et leurs filiales, leurs associés, etc. voient se rapprocher le mur contre lequel ils vont se cogner. La censure que les uns et les autres infligent à Donald Trump et ses amis est la goutte d’eau de trop ! Leurs complaisances au nom d’un soi-disant statut qui ne fait pas d’eux des organes de presse, mais les petits messagers modernes de l’information moderne, ne tiennent plus. Le moment est proche où ils vont être soit démantelés soit reconnus comme organes de presse et dans tous ces cas soumis aux règles qui les encadrent, pays par pays, ainsi qu’à celles relatives à la publicité et, plus généralement, à celles qui condamnent l’abus de position dominante et de comportements monopolistiques. La démondialisation informatique et les cloisonnements internationaux de l’internet sous toutes ses variantes leur porteront un coup sévère.

Dans ces conditions, il est urgent pour Facebook d’annoncer, qu’il a trouvé la pierre philosophale qui, à partir d’un projet qui a sombré corps et biens, la Libra, lui permettra de lancer des stable-coins aux couleurs des nations qui en feraient la demande.

Quand on analyse les aspects théoriques des monnaies cryptées façon Facebook, on ne peut qu’être frappé par le reniement des idées libertariennes et la recherche du profit par tous moyens.

"Security" ou pas, la ou les crypto-monnaies, ne sont plus une composante de l’informatisation des économies, elles en sont un sous-produit "greedy" qui ne doit sa survie qu’à la fantastique sur-liquidité des économies occidentales.

Face aux jeux de Facebook, où est la monnaie ?

Grâce à Keynes, la monnaie a trouvé sa vraie place dans la pensée économique. Mais, à cause de Keynes, elle a perdu son sens profond. Elle est devenue un outil : cela a donné de bons résultats par comparaison aux conceptions "classiques". Mais, elle est passée du statut de "nullius ex machina" à celui de "deus in machina". Ceci a conduit à deux aberrations : "l’helicopter money" produit de l’imagination des politiques et la monnaie cryptée issue de la pureté mathématique des ordinateurs.

La monnaie n’est pas la valeur. Elle ne produit pas de la valeur. Elle n’est ni le Nil qui dépose ses sédiments ni le veau d’or porté par des adorateurs. Fonctionnellement, le rôle de la monnaie est de "transporter la valeur" comme le téléphone transporte la voix. Sur un plan plus général encore, la monnaie transporte le "temps". La monnaie n’existe pas par elle-même : elle est portée par la confiance et la croyance que manifestent les membres d’un groupe.

Touchant des termes sociaux aussi essentiels que le temps, la confiance et la croyance, la monnaie ne peut pas être laissée à l’appréciation des marchands, ni devenir l’objet d’une entreprise économique. Elle est, par excellence, un bien commun ou collectif, comme le sont la justice, la santé, l’éducation, l’armée. S’il est imaginable d’en déléguer la gestion, ce ne peut être que sous le contrôle étroit du souverain, pris comme le représentant des membres d’une communauté.

Les techniques qui entourent la monnaie, moyen de transport de la valeur, n’affectent évidemment pas la valeur transportée, ni a fortiori la production de la valeur ou sa transformation, pas davantage qu’un wagon ne joue de rôle vis-à-vis des marchandises transportées. L’informatisation de la monnaie reflète l’informatisation de la société et ne joue aucun rôle dans sa diffusion au sein de l’économie. Pour que ce soit l’inverse, il faudrait que l’informatisation de la société ait provoqué une modification dans ce qu’on a nommé les termes sociaux : temps, confiance et croyance. C’est un vrai sujet, mais ce n’est pas un sujet monétaire.

Les petites guerres américaines sur les monnaies cryptées privées jouent sur les confusions que le démantèlement, aux États-Unis, des règles du jeu économique a favorisées et entretenues. Le temps est venu de s’en déprendre. Les Chinois, sur ce terrain, sont en avance.

Pascal Ordonneau, ancien PDG de HSBC invoice finance, est aujourd'hui secrétaire général de l'Institut de l'Iconomie.

 

 

 Dans la bataille des monnaies numériques souveraines, la Chine fait la course en tête

 

 

 

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Quelques ouvrages de Pascal Ordonneau

Panthéon au Carré est disponible aux éditions de la Route de la Soie.

Promotion est disponible chez Numeriklivre et dans toutes les librairies "digitales"

Au Pays de l'Eau et des Dieux est disponible chez Jacques Flament Editeur ainsi que

La Désillusion, le retour de l'Empire allemand, le Bunker et "Survivre dans un monde de Cons".

"La bataille mondiale des matières premières", "le crédit à moyen et long terme" et "Les multinationales contre les Etats" sont épuisés. 

En collaboration: Institut de l'Iconomie

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