A la recherche de Jacques Emile Blanche




Exposition : du côté de chez Jacques-Émile Blanche

Un salon à la Belle Époque

 

 

11 octobre 2012 - 27 janvier 2013

Fondation Pierre Bergé-Yves Saint Laurent.

 

 

Les lieux-ailleurs sont ces endroits de Paris, maisons, musées, places, sans limitation, qui me donnent un sentiment d’apaisement, de calme et de suspension du temps. On ne s’y trouve pas dans la contrainte de faire ou de dire. Il n’y a pas de presse comme si, à force d’être hors du temps, un filtre à l’entrée ne laisserait passer que les candidats à l’absence, aux songes et aux voyages intérieurs.


Parmi ces Lieux-Ailleurs, il y a le Musée de la Chasse. Il y aussi la fondation Pierre Bergé-Yves Saint Laurent.

Ce dernier Lieu-Ailleurs ne tient pas à la disposition des lieux, à une architecture remarquable, ni enfin à une situation géographique parisienne d’exception. Bel immeuble certes, dans un beau quartier, mais pas davantage. Son charme de Lieu-Ailleurs réside dans tout l’art mis à bien exposer. J’ai dit dans ce site tout le bien que je pensais de l’exposition sur Gisèle Freund ou celle sur les vêtements du théâtre Japonais Kabuki. Expositions magiques qui ne devaient pas seulement leur force et leur charme aux œuvres et aux auteurs exposés, mais aussi, surtout, à la façon de le faire.


L’exposition consacrée à Jacques Emile Blanche est un magnifique exemple de cet exercice de séduction et de charme.


Le sujet « Blanche » est connu. Peintre de la société de la « Belle Epoque ». Blanche n’est pas un révolutionnaire : il peint « classique » quand les impressionnistes viennent de ravager le paysage que nous avait laissé la Renaissance. Il peint des portraits, essentiellement des portraits et des scènes d’intérieur « à l’ancienne ». Autant dire que cela n’a rien à voir avec les masses et les formes au couteau et au marteau des portraits de Cézanne. Blanche contemporain de Picasso ne changera pas sa manière.


Jacques-Emile Blanche n’est pas un artiste qui s’interroge sur la production de l’art. Ce n’est pas un visionnaire ni un créateur d’absolu. Peintre portraitiste, il doit à ses clients de les portraiturer au plus près de leur personnalité. Il n’est pas dans la lignée d’Ingres et de son exigence de pureté, de précision et limpidité. Il n’est pas dans l’esprit des romantiques et ne va pas chercher chez ses modèles des sentiments qui n’y ont jamais été. Il est un fidèle serviteur de l’image à rendre. Miroir qui réfléchit avant de renvoyer les images. Miroir où se retrouvent tels qu’en eux-mêmes les gens de la bonne société qu’il fréquente et qu’il peint. Auteur du célèbre portrait de Proust à l’orchidée, fait de rêverie, d’absence, de mélancolie et de douceur. Tableau que l’écrivain emportera dans tous ses déplacements. Tableau dans lequel il se reconnaissait absolument.


Jacques-Emile Blanche a-t-il été tué par la photographie ? Ou par la fin d’un monde, de son monde, celui de Proust, celui des grands aristocrates dépensiers, des banquiers mécènes et surtout des artistes amis des salons, de la conversation et de la « Société ». Par les deux peut-être. Par le ravage des illusions européennes sous les coups de la guerre et par l’essor d’un monde nouveau. Son métier de portraitiste n’y a pas résisté.   « Nous nous asseyons près de la même cheminée; les miroirs reproduisent les mêmes fantômes, plus amaigris, plus palis; mais les portraits ne sont plus là... ». L’homme qui s’effaçait devant ses modèles, les ducs, les artistes, les femmes du monde, les politiques, l’artiste dont le savoir-faire tenait aussi à sa connaissance du monde dans lequel ils évoluaient, n’est plus. Jacques-Emile Blanche a vu ce rapport si fin, si traditionnel qui lie celui qui peint et celui qui désire être peint se transformer en un rapport où le modèle n’est plus un sujet, mais un pur objet, comme une potiche ou comme un bouquet de fleurs, donné au peintre, choisi par lui, pour s’exprimer, pour parler de lui-même, de sa vision du monde et de la façon dont il veut dire ses vérités. Un commentaire de Jacques-Emile Blanche sur Picasso jette une lumière crue sur cette inversion du rapport artistique : « il existe un Picasso qui s'appelle "portrait de Jean Cocteau" » !


Il faut aller voir cette exposition pour rencontrer les fantômes que le magicien Jacques-Emile Blanche a su saisir, avec leur consentement plein et entier. Comme on est dans un Lieu-Ailleurs, cette rencontre ne se fera pas comme il sied d’habitude dans une exposition de peinture. Les regardeurs n’ont pas, par déférence ? à demeurer debout, casquette ou chapeau à la main. L’exposition ici est une invitation à se promener au milieu d’invités célèbres. Peut-être se découvre-t-on le convive ou l’hôte d’un de ces salons qu’ils aimaient fréquenter ? Un sofa s’offre à vous si vous vous sentez fatiguer de conversations brillantes. L’œil est reposé par les passementeries et les tapisseries qui garnissent fauteuils et huisseries. Une chaise est là contre une cheminée pour continuer une lecture ou un peu plus loin une ottomane se propose pour que, détendu, recueilli ou pensif, vous entendiez mieux les lettres qu’on lit en public, les manuscrits soumis au beau Monde. Qui achèterait un livre qui n’aurait pas subi cette épreuve, charmante mais redoutable ? Quel poète pourrait prétendre à une publication sans s’être d’abord soumis à la délicate opération de déclamation ? Quelle actrice aurait-elle pu être séduite par un personnage, une tirade, une intrigue si, au milieu du cercle des proches, l’auteur n’avait pas lui-même défendu son texte ?


Proust, Montesquiou, Sargent, Stravinsky, Barres… ils sont tous réunis, dans un salon improbable, pour vous écouter rêver, pour disputer de vos goûts et pour s’affairer aux choses importantes, l’art, la poésie, la politique même. J’ai vu, dans ce salon, ouvert pour un temps trop bref, le souvenir d’une aïeule, à la silhouette fragile, à l’élégance fanée, une flûte de champagne à la main, lancer à un peintre de falaise et de mer, « qu’importe le nécessaire, mon cher, pourvu qu’on ait le superflu ».


Ne passez pas trop de votre temps à contempler les portraits. Assis à coté d’une porte-fenêtre, laissez les vaquer à la conversation, écoutez les briller, souffrez comme ce jeune artiste timide qui vient faire ses débuts et pensez à l’opéra demain ou aux courses, s’il fait beau. 

 

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