Dorothea Lange, au Jeu de PaumeDorothea Lange, au-delà du reportage et du photo-journalisme

 

 

Musée du Jeu de Paume

Jusqu’au 27 janvier 2019

 

Dorothea Lange est une des plus grandes photojournalistes parmi les photojournalistes (dont il faut remarquer qu’ils étaient tous massivement masculins). Ce pourrait être un titre de gloire. Celui qu’elle a conquis en répondant profondément honnêtement à la demande qui lui avait été faite d’enquêter sur les malheurs de l’Amérique profonde, celle du fameux dust-bowl, celle des migrants intérieurs qui vont d’espoir de travail en espérance de vie meilleure sans jamais les trouver, celle d’une autre Amérique, l’Amérique du « Sad-west » et de les documenter.

 

Il en est un autre qu’on a tendance à passer sous silence, ou, plus exactement à cantonner, à mettre de côté, « ce n’est pas ça qui est important ». Cet autre, c’est l’extraordinaire talent de photographe pur, au-delà de tous les documents et de toutes les informations ! Dorothea Lange est l’auteur d’une image qui a fait le tour du monde et qui donne à voir la douleur d’une mère face à l’adversité, à la faim et à l’angoisse du lendemain: « Migrant Mother ». Cette photo est ce qu’on nomme une photo iconique, mais c’est surtout une photo travaillée où l’effet est recherché. De multiples poses, des changements de positions, une distance au sujet travaillée en font, bien davantage qu’un document, une œuvre artistique à part entière. Alors même que de nombreuses photos de « migrants », ou de travailleurs, ou de files de chômeurs donnent le sentiment de l’immédiateté, "Migrant Mother" nous parle plus du travail d’artiste que de journaliste.

 

C’est ce talent qu’on veut ici mettre en valeur, on ne le fera pas en diminuant son travail d’enquêteur et de documentaliste, on montrera que ce travail lui-même s’est appuyé sur une expression artistique puissante.

 

On commencera par des images simples : on a sélectionné quelques images qui répondent bien à cette idée d’une recherche esthétique , un silo, une terre fissurée et la courbe impeccable de sillons qui viennent d’être tracés. Dans tous les cas, la mise en photo privilégie, la simplicité, une vue claire, sans message particulier, une recherche d’images qui devaient jaillir au regard et que la photographe donne à voir au regardeur dans toute la force de leur simplicité géométrique, de formes abstraites indépendantes de la réalité sur laquelle elle se fonde. La grange, est dépouillée de tout, de son rôle, de sa place dans l’économie rurale et des hommes qui l’ont construite. Elle se présente comme une abstraction de bâtiment de même que les sillons ne sont plus qu’un dessin clair et élégant : Chemins vers la maison qu’ils semblent porter ou vagues qui vont déferler au pied de la masure ? La photo du centre de « relocation de Manzanar » est totalement détachée de son contexte. Elle pourrait être une photo de n’importe quel rassemblement « à l’américaine » autour du "stars and stripes", camp de scout, camp militaire etc ». La qualité de la photo réside dans la restitution d’une forme géométrique impeccable.

 

Et dans le vent, purement, étincellent des robes et des chemisettes, flottant comme des fanions ou des drapeaux de fantaisie. Cette légèreté des choses et parfois des gens dont Dorothea Lange a multiplié les exemples. 

 

Elle fut une remarquable photographe des hommes et des femmes, saisissant des regards, des poses et des défis. Les visages ne sont pas nécessairement délabrés et défaits par la pauvreté. La jeune femme de Westley potatoe camp, la tête recouverte d’une coiffe pareille à celles que portaient les femmes néerlandaises ou les siciliennes, aurait pu être peinte en madone. Et cette autre jeune femme, installée sur le marchepied d’une vieille guimbarde, les yeux mi-clos, longiligne aux pieds nus, paisible et recueillie. Deux autres photos sont splendides, migrants, vus de dos, sur une route qui s’étend à l’infini. L’une étant enrichie d’un ricanement sous la forme d’un panneau publicitaire vantant les trajets en train !  Elles renvoient au final des « lumières de la ville » quand les deux héros partent et se dessinent en contre-jour devant une large voie qui s'élance vers l’immensité d’un pays sans relief.

 

Dorothea lange est une exceptionnelle artiste des formes. Elle a su donner leur donner vie quand, les sentiments, les drames s’inscrivaient sur les visages ou les corps. Terrible photo de cette jeune fille qui se tient debout, accolée à un mur délabré, face au photographe, jetant un regard sans yeux. Donnant à comprendre ce qu’être au bout du désespoir veut dire. Il y a aussi une image du désespoir pur, découpé par le soleil, en traces noires, en corps massif et immobile comme un rocher, une brouette déglinguée est posée à côté, renversée, cadavre de fer, restes dérisoires d’un outil inutile. Contrastes de noir et de blanc. Une photo intemporelle de la détresse humaine. De tous les temps. De tous les pays.

 

Il faudrait encore citer la photo, merveilleuse de légèreté du crieur de journaux mais aussi cette autre, sombre, de la femme dans l’auto.

 

 

L’exposition du jeu de Paume donne à comprendre et à voir combien la journaliste était une artiste pure. Magnifique exposition pour une magnifique photographe ? 

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