Richter, dessins au Louvre, IV

Méditation critique sur l’exposition Panorama Gerhard Richter au Louvre

Gerhard Richter, panorama à Beaubourg, dessins au Louvre.

Quatrième partie.

 

On m’avait dit (des amis apitoyés) « va donc voir les dessins ! Tu n’as pas aimé Richter parce qu’on t’a montré les grandes machines. On peut ne pas aimer Rubens lorsqu’on est confronté à ses tableaux sur la vie et la grandeur de Marie de Médicis. C’est la même chose pour Richter. Ce qu’on a montré à Beaubourg, c’est ce qu’il y a de facile dans son œuvre, ce qui ne dérange pas. Un musée n’est pas un lieu d’expérimentation. On ne s’amuse pas à faire peur au chaland. Au contraire, on veut qu’il vienne. Un musée sans « regardeur » c’est un congélateur à art, un entrepôt, une chambre forte. C’est bien pourquoi, on ne montre que des choses qui ne soulèveront pas les cœurs, qui n’horrifieront pas les enfants des écoles et qui ne perturberont pas les critères et les valeurs solides sur lesquels reposent les convictions artistiques des masses » .


On avait continué, indulgent et positif « va voir les dessins et les aquarelles ». Et on avait insisté : « oui ! va voir ça ! tu verras, tu changeras d’idées ! ». Et on m’avait souri, fraternellement, paternellement presque. On avait fait montre de gentillesse à l’égard de l’ignorant. Et puis, le dessin, l’aquarelle, tout le monde le sait, c’est le fin fond du travail de l’artiste. C’est là qu’on voit l’œuvre émerger, sortir de l’informe et prendre racine. Les dessins de Léonard n’en disent-ils pas plus que La visitation. Ceux de Raphaël, (ah ! les dessins de Raphael !) ces mains, ces pieds, ces esquisses de sourire, ne disent-ils pas la pensée de l’artiste qui se déploie ? Ne sont-ils pas empreints de l’œuvre en cours de conception ?


Donc les dessins. C’était me tenter à bon compte, je suis un lecteur compulsif et un dessin se lit plus qu’il ne se regarde. Un dessin est une relation artistique marquée du signe de l’intimité. On est seul, face à face, lorsqu’on regarde un dessin. Rien de plus ridicule que ces expositions où on s’efforce de montrer des dessins comme on montre une peinture. Un dessin ne se regarde pas de loin surtout lorsqu’il vient des carnets de l’artiste ou d’un portefeuille d’essais, de tentatives, de notes prises à la volée, de pensées transposées en courbes ou en graffitis.


Je fus donc voir les dessins de Gerhard Richter au Louvre.


J’ai été tout simplement atterré. C’était donc ça, l’œuvre en concentré de l’artiste concentré sur son œuvre ? Pas un seul instant, ne s’y montrait une œuvre originale, ni aucune vision en cours d’illumination. D’où avait-on pu tirer cette collection insipide de coups de crayon hasardeux ? Comment avait-on pu, extraire des vieux stocks de GR, des aquarelles aussi peu inspirées ? J’ai, pour ma part, toujours trouvé que les dessins, se lisaient pour ce qu’ils parlaient des œuvres et de leurs auteurs. Ici, rien. A force de regarder ces « rien », j’ai fini par me dire que ce que j’avais écrit sur Richter trouvait là sa justification. Ces coups de crayon, ces coulures de couleurs étaient ceux d’un reproducteur et non pas d’un visionnaire.

Et puis, il y a avait pire : un manque d’inspiration caricatural. Ce qui était montré venait trop souvent d’expériences déjà tentées et de recherches déjà engagées. Telle aquarelle(1984), couleurs essentielles, basiques, vives, n’était qu’une mauvaise redite de Maurice Estève. Avec un quart de siècle de retard. Tel dessin, ne pouvait pas ne pas faire penser à un artiste suisse, travaillant à Berlin qui n’a pas aussi bien réussi que GR : Albert Merks…Il faudrait aussi parler de redites des « Eponges » de Fautrier et de tentatives de tachisme improbables. Quant aux dessins « réalistes » (on veut dire par là, les dessins où on reconnait quelque chose) ils confinent le « Matisse » bâclé ! (E.with Child).

 

Décidément, je suis non seulement incorrigible mais en plus récidiviste.


Mes détracteurs me diront que s’il m’a fallu quatre épisodes pour dire tout le mal que je pensais de GR, c’est probablement parce que m’attaquant à un grand homme il m’a fallu aligner des arguments à sa hauteur. Parce qu’il se dressait tel un roc, il m’a fallu longuement pilonner. S’il avait été vraiment aussi peu intéressant que je le prétends sur des lignes et des lignes de texte, des pages entières recouvertes de mots, je n’aurais pas eu besoin de tant de travail d’écriture : une phrase assassine aurait suffi.

Quand un artiste n’a pas d’intérêt, il ne vaut même pas la peine d’une phrase assassine. GR, présente un triple intérêt.


-  GR est un artiste doublement connoté idéologiquement parlant : il est issu d’une famille adhérente aux idées Nazies (et pas simplement sympathisantes ou indifférentes). Il s’est formé sur les plans scolaires et universitaires sous l’influence de l’idéologie Est-allemande,  idéologie et pratique « Soviétique ».

-  Son travail est marqué par les grandes machines. Qu’elles soient réalistico-floutées ou abstraites. Celles qu’on installe volontiers dans les grands immeubles sociaux de l’industrie et de la finance allemande. Est-il un Ossi-alibi ?

- Il passe d’une technique à l’autre, d’une école à l’autre comme il est passé d’une idéologie à une autre. On dira que c’est ça la virtuosité. On rappellera que Picasso, lui-même, véritable caméléon, n’a pas cessé de faire évoluer sa « façon ». Le mot est bien trouvé : « caméléon », animal qui prend les aspects utiles de son environnement pour en tirer profit et ne pas subir d’inconvénients.

 

GR est un producteur d’art a-t-on affirmé. Il faut l’entendre au sens économique du terme.  Un producteur est l’agent agissant de l’offre. Il travaille pour satisfaire une demande. Rien de méprisable, ni de haïssable là-dedans. Sa formation, ses origines le rendent probablement plus efficace que d’autres artistes allemands. Il n’a pas eu à se justifier, se faire pardonner, se voir épurer. Il a pu, sans complexe, sans ciller, sans rougir, passer d’un univers à l’autre. « Surfer » en quelque sorte.  Comme le caméléon, le producteur ne doit pas s’embarrasser de convictions solides et inébranlables. N’est-il pas là pour satisfaire la demande ?

 

 

 

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