Araki au musée Guimet

J'aimerais aimer Araki...

 

 

 

J’aimerais aimer Araki, comme, apparemment, tout le monde l’aime. Araki, 500 livres. Des livres de photos. Peut-être, dans les 500 y a-t-il des photos en double ? Peu importe finalement ! Des éditeurs ont pris 500 fois des risques financiers pour publier les livres de photos d’Araki. Remarquez que dans les livres, il y a peut-être des livres d’entretiens. Des livres où Araki explique ce qu’il fait, pour les gens comme moi. Ceux qui ne comprennent pas. En fait, je pense que les livres d’entretiens sont destinés aux gens qui ont compris. Ce n’est pas pour leur expliquer ce qu’il faut comprendre, c’est pour leur faire comprendre que c’est vachement bien qu’ils aient tout compris. C’est pour les remercier. Je ne sais pas. Je n’ai pas vu les livres d’entretien.

 

Mais j’ai vu l’impressionnant mur des livres d’Araki au musée Guimet. Beau Musée que le Musée Guimet. Il y avait une magnifique exposition d’estampes et dessins sur le thème de la femme. Passionnant. Evidemment, il y a avait les fameuses « estampes japonaises ». Mais pas que cela. Il y avait aussi la femme japonaise telle qu’elle se présentait, il y avait des scènes de la vie japonaise, il y avait…

 

Il y avait Araki, parce que j’étais venu voir le travail photographique d’un des photographes les plus célèbres du Japon. Quand tout le monde chante les vertus d’un artiste, il faut se précipiter. Il ne faudrait pas rater l’émergence d’un génie. Ne pas refaire le coup des impressionnistes que personne n’allait admirer.

 

Je suis entré dans le Musée Guimet. On m’a indiqué que c’était au sous-sol. Il y avait peut-être un guide « audiophone » ; de toute façon je n’aime pas écouter la voix d’un type ou d’une bonne femme qui m’explique ce qu’il y a à aimer dans l’œuvre qu’on a en face de soi. Ça fait penser aux grands restaurants : les serveurs ou valets de bouche, je ne sais pas comment les nommer, ceux-là qui vous expliquent ce qu’il y a dans votre assiette et ce que le chef a voulu dire, comment il a ponctué son discours pour qu’un parcours gustatif soit pleinement accompli. Alors vous prenez votre fourchette, mais ce n’était pas cette fourchette-là, on vous en donne une autre, la bonne, avec un sourire, tout le monde ne peut pas savoir. Vous ne saviez pas. Mais vous êtes le client alors on ne vous en voudra pas.

 

Est-ce qu’on m’en voudra de n’avoir pas tout lu dans les phylactères ou les bulles qui ponctuent les différentes phases de l’œuvre d’Araki? J’ai vu celles qui disaient qu’il ne fallait pas emmener les enfants dans tous les espaces d’exposition car « certaines scènes peuvent choquer ».  Pour être sincère, il y avait tellement de gens devant les photos qui peuvent choquer que je n’ai pas vu grand-chose. En tout cas, je peux avancer sans parti pris que ce qui est choquant au pays du Soleil Levant n’a pas l’air d’effrayer sous nos latitudes. Comme je ne pouvais pas voir les photos, j’ai lu les commentaires (il y avait moins de monde).

Donc, l’art du bondage, contrairement à ce que d’aucuns pensent, n’a rien à voir avec des photos de nus saucissonnés et ficelés. On doit considérer la complexité des nœuds. On sait, que dans le Japon classique, le nœud était devenu un art. Savoir faire un nœud était réservé à une élite « d’éduqué ». La créativité fut un temps absolument débordante et cet art atteignit des sommets. Une fois les sommets atteints, les Japonais, hommes de défis, en ont cherché d’autres et l’art du nœud comme l’art du bouquet ou bien d’autres encore a décliné. Heureusement, de nos jours de vrais artistes ont voulu retrouver les techniques ancestrales et l’art du nœud retrouve une nouvelle jeunesse grâce à de jeunes créateurs et à un nouveau débordement d’imagination. Araki fait partie de ces artistes jeunes. Non seulement il sait faire des nœuds mais en plus il les photographie. Certains artistes font des nœuds avec des cordes, d’autres avec des fils de soie, on a même entendu parler des nœuds arachnéens qui, comme leur nom l’indique, sont réalisés avec des fils d’araignée. Araki, d’après ce que j’ai compris utilise un peu de tout, du ruban scotch, de la corde pour pendaison publique, de la corde à sauter (sans sous-entendu s’il vous plait). On dit même qu’il aurait fait des nœuds avec de la corde à nœuds.

 

Mais, il ne faudrait pas imaginer qu’Araki s’est contenté de faire des nœuds et de les photographier y compris lorsqu’une femme toute nue s’est introduit à l’intérieur du nœud sans y prendre garde. Il a aussi pris des fleurs en photos. En couleurs aussi. Ça change beaucoup de prendre une photo de fleurs en couleur au lieu de la prendre en noir et blanc. Regardez Mapplethorpe. Ses photos de fleurs sont en noir et blanc. On ne peut pas s’attendre à autre chose qu’à une sorte de perfection formelle (elles sont d’ailleurs merveilleusement belles et d’une pureté formelle exceptionnelle). Donc, regardez les photos de fleurs de Mapplethorpe, elles manquent de couleur ! Alors qu’avec Araki, il y a beaucoup de couleurs. Rouge. Il est connu que le Rouge c’est sexuel et sensuel. Il est connu qu’en les photographiant sous un certain angle les photos de fleurs suggèrent parfois crument les organes sexuels de la femme. (Pour les hommes, il vaut mieux recourir aux fruits et encore le résultat n’est pas assuré). Au fait, Araki aurait surtout photographié des fleurs rouges ? On dit, que non, mais qu’il aurait peint en rouge certaines fleurs qui étaient trop bleues pour être rouges.

 

Dans l’œuvre d’Araki, 500 livres, il n’y a pas que des nœuds ou des fleurs, il y a aussi des gens. Beaucoup de gens. Des gens d’un peu partout. Araki, c’est lui qui le dit, n’a jamais pu se passer de son appareil de photo. J’ai dû trouver ça dans un entretien. C’est comme ça, c’est compulsif. C’est un serial photographer. Il appuie, il appuie, il appuie, il déclenche à toute berzingue. C’est un drogué de l’obturateur qui se désobture. C’est pourquoi Araki peut dire qu’il a fait des milliers de photo. Le tout c’est d’avoir le pognon pour développer. Et puis, au fond pourquoi développer tout ? ça fait très petit bourgeois que de vouloir développer. Et faire des albums aussi, tant qu’on y est ? En collant les photos ? Ridicule !

 

Plus sérieusement, je pense qu’une partie de l’œuvre d’Araki est en train de passer à la trappe. C’est la partie la plus importante : les photos qui n’ont pas été développées. Cela fait penser à la matière noire : on se réjouit de voir les belles étoiles et les constellations et tout ça avec les étranges photos de Hubble. On a tort, on ne voit pas l’essentiel. La matière noire compte pour l’essentiel de la matière dans l’univers. Et on ne la voit pas. Alors que c’est peut-être ce qu’il y a de plus beau mais qu’on ne peut pas voir parce qu’on ne sait pas bien ce que c’est que la matière noire.

 

Eh bien Araki, c’est la même chose : ce qui est le plus beau dans son œuvre c’est ce qu’on ne voit pas, sa matière noire à lui, qu'il ne peut pas montrer parce qu’il ne sait pas encore très où elle est.

 

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